I Am Martin Parr : Portrait d’un photographe aussi ironique qu’iconique
Le documentaire I Am Martin Parr, réalisé par Lee Shulman, nous plonge dans l’univers singulier de Martin Parr, figure emblématique de la photographie britannique contemporaine. À travers un road trip dans toute l’Angleterre, ce documentaire dresse un portrait intime et dynamique de cet artiste souvent incompris, dont l’obsession pour ses sujets, ses cadres et ses couleurs a révolutionné la photographie actuelle
PHOTOGRAPHIE ARGENTIQUEACTUALITÉS
Lise Longis
5/6/20253 min read


Le documentaire I Am Martin Parr, réalisé par Lee Shulman, nous plonge dans l’univers singulier de Martin Parr, figure emblématique de la photographie britannique contemporaine. À travers un road trip dans toute l’Angleterre, ce documentaire dresse un portrait intime et dynamique de cet artiste souvent incompris, dont l’obsession pour ses sujets, ses cadres et ses couleurs a révolutionné la photographie actuelle.
Une œuvre, presque une satire sociale
Depuis les années 1970, Martin Parr s’est donné comme mission de documenter la société occidentale avec un regard autant acéré que amusé. Ce qui distingue son œuvre, c’est cette capacité à mêler humour, ironie mais aussi tendresse pour mieux dévoiler les travers de notre quotidien : le consumérisme, la standardisation des loisirs ainsi que la superficialité de certains comportements.
Son style devient très rapidement reconnaissable : couleurs vives, flash frontal, cadrages serrés. Cette esthétique aux couleurs criardes, à la limite du kitsch vient argumenter l'exagération des situations. Là où d'autres photographes chercheraient à sublimer, Parr révèle, souvent sans filtre, ce que nous préférerions peut-être ignorer.
Le documentaire I Am Martin Parr met particulièrement en valeur cette dualité entre moquerie et fascination, à travers l’analyse de sa série emblématique The Last Resort (1983-85). Dans cette série, Parr photographie les familles de la classe ouvrière britannique en vacances à New Brighton, une station balnéaire proche de Liverpool. Ces images, prises dans un contexte de déclin industriel, montrent des corps en maillot de bain parfois (souvent) kitch, des enfants avec des glaces dégoulinantes avec le soleil, des foules agglutinées autour de piscines peu reluisantes, de camions de glaces et tant d’autres !
Mais derrière ces œuvres, il y a aussi une profonde humanité. En capturant ces instants de loisir populaires, souvent ignorés ou méprisés par l’art officiel, Parr donne une visibilité à une partie de la population jusque-là très peu représentée dans le paysage photographique britannique.

Une exploration visuelle de l’Angleterre
Au-delà de l’analyse de son œuvre, le documentaire offre une immersion dans les lieux emblématiques qui ont inspiré Parr. Des plages de Blackpool aux rues de Hebden Bridge, le spectateur suit le photographe dans ses sorties photos, découvrant ainsi les coulisses de sa démarche artistique et la manière dont il interagit avec ses sujets.
Photographier partout, tout le temps
L’un des aspects les plus frappants du documentaire I Am Martin Parr est la manière dont il révèle l’obsession du photographe pour l’image. Pour Martin Parr, photographier n’est pas une activité qu’on planifie, c’est un mode de vie, une manière d’être au monde.
Il capture tout, tout le temps, partout : en vacances, au supermarché, dans la rue, lors de cérémonies officielles… et même à l’hôpital. Le documentaire évoque d’ailleurs avec humour l’anecdote d’un séjour à l'hôpital pendant lequel il a continué à photographier, transformant ce moment intime en œuvre visuelle.
Cette insatiabilité de photographie témoigne d’une curiosité pour le réel, les moments de vie mais aussi d’une volonté de ne rien hiérarchiser. Pour Martin Parr, il n’existe pas de "grands" ou de "petits" sujets. Une assiette de nourriture, un couple sur la plage ou une salle d’attente deviennent autant de fragments d’un monde en perpétuel mouvement, qu’il s’efforce d’archiver. Ce rapport permanent à l’image en fait un témoin du temps qui passe et de nos habitudes de vie, de consommation et tant d’autres.
Ce geste photographique constant est aussi une manière pour Parr de capter l’énergie du quotidien, de saisir ce que nous ne voyons plus, par habitude ou indifférence. Il révèle ainsi une beauté étrange mais toujours profondément humaine partout, tout le temps.
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